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Je suis née dans le Morvan durant l'hiver 1956



En généalogie, j'aime évoquer mes ancêtres et retrouver leurs modes de vie, leurs métiers, leurs lieux d'habitat.  Puis je me suis posée une question : pourquoi ne pas évoquer ma vie  ? En tous cas, témoigner de mes souvenirs d'une certaine époque que j'ai traversée.  J'ai connu tellement de transformations, de changements en moi et autour de moi. Car je suis une enfant de l'après-guerre. Une période qui va connaître des avancées technologiques formidables, une croissance économique réelle, des avancées sociales et des bouleversements sociétaux. Je les ai vécu sans toujours en prendre conscience. J'ai envie aujourd'hui de me retourner sur ces évolutions,  et sans nostalgie, témoigner d'une époque si récente et déjà si lointaine. 

Je suis une enfant de la fin de l'année 1956. C'est une année qui a connu un record de froid avec des températures inférieures à  -20°C dans la plus grande partie de la France. Sous la IV° République, le Front républicain regroupant la SFIO et les radicaux viennent de gagner les législatives et le Président René COTY propose à Guy MOLLET de gouverner le pays. 

Nous sommes 800 000 enfants à naître cette année là. Mes parents ont choisi un prénom original Véronique, qui tranchait un peu avec les Martine, Françoise, Chantal... de l'époque. Jusqu'à 1974, année de mon baccalauréat, nous allons traverser des évolutions sociales, politiques d'importance. Je serais spectatrice des évènements de 1968, trop jeune pour y participer, mais suffisamment consciente pour sentir l'ancien monde basculer. La société de 1974 n'aura plus grand chose à voir avec celle de l'année 1956.  J'aurais l'occasion de revenir sur ces riches années. Aujourd'hui, permettez moi d'évoquer l'année et les circonstances de ma naissance. 


Mars 1956 : Le mariage de mes parents dans l’Yonne

Mes parents Arlette BOURGOIN et Jean BATTUT, instituteurs formés à l’Ecole Normale d’Auxerre, dans laquelle ils se sont rencontrés,  se marient  dans la commune de Chailley dans l’Yonne le  26 mars 1956. Arlette a 21 ans, Jean 23 ans.

Mariage de mes parents Arlette et Jean le 30 mars 1956

Septembre 1956 : L’école de campagne dans les vallons du Morvan

Mes parents sont affectés à la rentrée scolaire dans une école de campagne située en plein champ, en Bourgogne, dans le Nivernais, au pied du massif du Morvan,  à égale distance du bourg de Courcelles et de Chivres. 


Situation du village de Courcelles dans la Nièvre

Mon père raconte qu'un grimoire qu'il avait découvert montrait qu'on avait ainsi tranché au moment de décider de la construction de l'école à la fin du XIXème siècle. Je le cite : "l'avantage de la pleine campagne c'est que chantaient dans notre cour les faisans descendus du coteau tout proche et que le parfum de la reine des près de la prairie où coulait la paisible Sainte Eugénie se mêlait aux senteurs du gros tilleul dans lequel bourdonnaient les abeilles"
Courcelles est une commune qui compte 231 habitants au recensement de 1954. Le maire est depuis 1950, M. Louis François agriculteur.


Chemin de campagne à Courcelles
Ma mère enseigne aux 21 élèves de la classe des petits de la classe enfantine aux  CE1. Mon père enseigne dans la classe des 21 grands du CE2 à la classe de fin d’études, qui prépare au certificat d’études primaires. Ils sont logés sur place, dans le logement de fonction de l'école, qui ne possède pas l'eau courante. 
La maitrise de la fertilité n’est pas une chose facile pour les couples. Le débat sur le contrôle des naissances n’en est qu’à ses débuts. La contraception est alors interdite par la loi. C’est donc tout naturellement que je nais 9 mois après la date du mariage,  le 22 décembre 1956. 

22 décembre 1956 : Une naissance mouvementée dans la neige


Faire part de naissance 22/12/1956

Extrait acte de naissance - livret de famille

L’histoire de ma naissance est une aventure. Il faut imaginer que mes parents ne possédaient qu’un scooter et un vélo leur avait été prêté.

                           
Le scooter de mes parents en 1955

La cuisinière ronfle bourrée de bûches en cette nuit du 21 décembre 1956. C'est le dernier jour de classe avant les vacances de Noël. Ma mère se plaint de ses premières contractions dans la nuit. Il fait nuit très tôt en décembre dans le Nivernais. Il reste à imaginer une époque sans téléphone. Il faut alerter les voisins situés au village de Courcelles à 2 kilomètres qui sont les seuls à posséder une voiture, susceptible d’emmener ma mère à la maternité de Clamecy à 15 km.  A cette époque, on n’accouche plus à domicile.  Mon père s’élance donc sur la neige sur un vélo, en pleine nuit,  pour aller téléphoner depuis la cabine téléphonique du café du village. Le café est fermé et il doit taper à la fenêtre pour réveiller la propriétaire. La clinique de Clamecy est informée de l’arrivée de ma mère.

Colonel Perruchet et Mme Perruchet


Colonel Perruchet (archives Michel Perruchet)

Mme Perruchet (archives Michel Perruchet)

M Perruchet, Colonel à la retraite, et animateur de l’Amicale créée autour de l’école, est préposé au convoyage dans sa vielle voiture Hotchkiss aux énormes gardes boues. Il s’est entrainé depuis quelques jours à la faire tourner à vide pour qu’au signal, le chauffeur et le véhicule soient opérationnels. Il s’installe au volant de sa Hotchkiss. C'est la seule voiture du village.

Son épouse, Madame Perruchet va se charger pour la journée des 42  élèves de l’école.
Une voiture modèle Hotchkiss

Il part récupérer ma mère à l’école et emmène le couple sur la route de Clamecy. Il fait froid. La route est enneigée. La voiture s’arrête sur le chemin. Ma mère s’imagine devoir accoucher dans la voiture. Le véhicule repart et amène le couple jusqu’à la maternité. Ma naissance à 11h50, le 22 décembre 1956 se précipite dès l’arrivée dans ce lieu moins hostile.  

Docteur Barbier
C’est le Docteur Barbier qui procède à l’accouchement. Il deviendra maire de la ville de Clamecy dans la Nièvre puis sénateur de la Nièvre.

 
Docteur Barbier, Directeur de la clinique de Clamecy en 1956

L'actualité du 22 décembre 1956

Le même jour, l'actualité du monde se poursuit. A partir de journaux de ce jour que j'ai pu me procurer dans un salon des vieux papiers, j'évoque les informations principales, dont je suis à ce moment là, bien loin ! 


Actualité sur l'espionnage du 22 décembre 1956
Une Française arrêtée pour espionnage
L’actualité de ce jour du 22 décembre 1956 est concentrée sur les évènements du bloc soviétique. Une française Raymonde Soubine,  33 ans, agent des services de renseignements d’un pays du bloc soviétique, la Tchécoslavquie, est arrêtée pour espionnage. 


                 
22 décembre 1956 : l'ultimatum des mineurs hongrois



                                                                                                                                                                     

La grève des mineurs hongrois
Les mineurs  en grève en Hongrie demandent la démission de M Kadar, le retrait des troupes soviétiques présentes depuis le soulèvement du 23 octobre, des dispositions pour des élections libres. L’insurrection de Budapest dure quelques semaines, fait 2800 morts et 20 000 blessés du côté hongrois et 700 morts et 1600 blessés du coté russe,  avant d’être écrasée définitivement en janvier 1957, avec l’exécution de 225 Hongrois accusés d’avoir participé à cette insurrection.



 
             
     

La crise du Canal de Suez
Le 22 décembre 1956 : La crise du canal de Suez est un conflit entre l’Egypte et l’alliance entre kla France et le Rotyaume Uni , suite à la nationalisation unilatérale par l’Egyspte de Nasser du canal de Suez, lieu stratégique de transport maritime international  entre l’Europe et l’extreme orient.

     
           
Crise Canal de Suez Décembre 1956 - Journal Sud Ouest
      

Après l'opération de Suez, qui voit, à la demande des USA,  l’ONU s’interposer dans le conflit entre Israel alliés des Français et britanniques, et l’Egypte,  les dernières forces franco-britanniques quittent Port-Saïd le 22 décembre 1956.


                                                   
                                    
                                    
Sortie du nouveau film de Gallone avec Françoise Fabian
Sur le plan culturel, ce jour là , Michel Strogoff est le 3ème ouvrage de Jules Verne porté à l’écran par le metteur en scène italien Carmine Gallone avec l’actrice Françoise Fabian.

Affiche film Michel Strogoff 1956

Publicité Manufrance
Sur le plan commercial, Manufrance, manufacture  de Saint Etienne, lance sa publicité pour la machine à coudre Omnia au prix de 32500 francs.



Naissance de la Dauphine par Renault
Naissance en 1956 de la Voiture Renault appelée "Dauphine"

27 Décembre 1956 : retour à la maison-école

Pendant le séjour à la clinique, et le congé de maternité, faute de remplaçant, mon père, revêtu de sa blouse grise en coton, rassemble les 2 classes allant de la classe enfantine à la classe de fin d’études.

Dans la journée, je suis installée dans la cuisine du logement de fonction, la pièce la plus chaude. La porte donne sur la classe de ma mère. Une jeune fille me garde mais ma mère vient régulièrement surveiller son bébé.

Ma mère avec moi dans les bras devant l'école de Courcelles

L’apparition du biberon
Ma mère m'allaite à la naissance. Très vite, son lait est décrété mal adapté à ma nourriture. Les biberons faciles à  nettoyer sont en vente sur le marché. Ils sont en verre et c’est avec le biberon que je suis nourrie.  Le premier lait en poudre apparaît.

Publicité pour le biberon 1956

Le bain
L’eau courante n’est pas installée dans le logement de fonctions de mes parents instituteurs. Il faut aller chercher l’eau à la pompe. Elle est très froide, voire glacée.  Elle est réchauffée au feu de la cuisinière à bois avant d’être versée dans la cuvette en plastique.
Le bain de bébé en 1956

                          
Les langes
Le bébé est emmailloté. Un linge triangulaire est placé entre les fesses du bébé, et grâce à un savant croisement du même linge et une épingle à nourrice, le bébé est enveloppé fermement. Puis apparaissent les brassières et les culottes bouffantes en coton. Les couches en tissu, sont lavées chaque jour. Le berceau est installé dans la pièce la plus chaude de la maison, la cuisine, avant d’intégrer la chambre de mes parents puis ma chambre personnelle.


Mon père me porte emmaillotée en langes 1956
Le landau
Le beau landau sert à me promener dans les rues de campagne, protégé par sa capote épaisse. Il sert aussi à me garder, bien calé par des coussins. Il fait froid sur le carrelage du sol.
Mon landeau en 1956


Le pot
Il est en bois avec un petit dossier à l’arrière. Le pot est installé dans le trou au centre du meuble. C’est un grand progrès. Mon arrière grand-mère Anna Lajeat surveille mes progrès. 
                                        

Le pot en bois 1955


En guise de conclusion provisoire ...

J'ai vécu mes 3 premières années dans l'école de Courcelles, au milieu des champs, dans cette nature préservée et reculée du Morvan.  C'était une autre époque. J'en garde le souvenir d'un espace protecteur,  paisible, un amour de la campagne, un sentiment de plénitude. On est marqué à tout jamais par sa petite enfance. 







Parcours d'un poilu à travers ses cartes postales

Lucien GUIBERT, 

soldat au 6ème régiment d'artillerie à pied, 

puis dans la Division d'Orient à Salonique


Lucien GUIBERT en 1914

Lucien Arthur GUIBERT (Sosa n°14) pose fièrement dans l'album de famille en tenue de soldat. La photo est datée, au dos,  de 1914.  J'en déduis que mon arrière grand père, comme toute sa génération, a été un poilu. La photo indique qu'il est soldat du 6ème régiment d'artillerie à pied.

Lucien est né le 19 février 1887 à Guerchy dans l'Yonne. Il est intégré, 20 ans après sa naissance, dans la Classe 1907. Malgré la numérisation des registres matricules par les Archives départementales de l'Yonne, je n'ai retrouvé son nom dans les listes. Il est vraisemblable qu'il demeurait dans un autre département et que son nom se retrouve ailleurs. Pour l'instant je n'ai aucune indication qui me permette de pousser mes recherches.


Acte de naissance de Lucien GUIBERT à Guerchy

A 24 ans, il se marie avec Thérèse Jeanne BRUNEAU, le 29 avril 1911 à Guerchy (Yonne).  Sa fille Germaine est née le 8 janvier 1914 à Auxerre.   Il exerce le métier de Conducteur des travaux des Postes, Téléphones et Télécommunications (PTT).  Il installe les poteaux et les lignes de téléphone, le long des rails de chemins de fer.

Il a 27 ans, le 2 août 1914, lorsque l'ordre de mobilisation générale est décrété par le Président de la République.

Ordre de mobilisation générale le 2 août 1914

Son fils Robert  nait le 23 avril 1915 à Guerchy. Son père est déjà parti au front et sa mère Thérèse est retournée vivre chez ses parents à Guerchy. Leur séparation durera 4 longues années.

Collection de cartes postales anciennes

J'ai retrouvé des cartes postales que Lucien adressait à son épouse depuis le Front. J'ai tenté de retracer son parcours à travers ces cartes postales lointaines. Celles-ci ont été conservées dans un carton par Thérèse, puis par sa fille Germaine, enfin à ma mère Arlette qui me les a remises. Je les ai lues (l'écriture est régulière tracée au crayon à papier), classées et j'ai retrouvé une chronologie.
Ces cartes postales ne sont pas banales car pour l'essentiel, elles proviennent de Salonique en Grèce. Leur nombre est d'une centaine. Le problème est que ces cartes ne sont pas datées car il y avait surement des consignes strictes liées à la sécurité et à la censure. Les informations sont donc assez banales et ne permettent jamais de connaitre des informations stratégiques. Il faut donc comparer ces cartes avec les périodes historiques grâce à des recherches complémentaires.  Ces cartes postales nous font entrer dans la Grande Histoire.

La Grande Histoire : La poudrière des Balkans

Le 28 juin 1914, l'Archiduc François Ferdinand, héritier du trône Austrois-Hongrois est assassiné par un nationaliste Serbe. Le mois suivant l'Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Serbie. Les jeu des accords entraine la première guerre mondiale. L'Allemagne forme avec l'Autriche-Hongrie "l'alliance des empires centraux" et la Russie, la Grande-Bretagne et la France forment la "triple entente" et sont alliés à la Serbie. Peu après la guerre s'étendra à d'autres pays des Balkans et au delà. L'armée française d'Orient est une unité de l'armée de terre française qui combat durant la première guerre mondiale sur le front d'Orient de 1915 à 1918. En 1916, l'armée française d'Orient fait partie des armées alliées d'Orient regroupant les armées britannique, serbe, italienne, russe et grecque. Elles provoqueront la défaite de la Bulgarie, reconquièrent la Serbie, la Roumanie et envahissent l'Autriche-Hongrie.





Carte de Balkans en 1910

La Campagne d'Orient : le départ de Lucien Guibert

De 1915 à 1918, ce sont plus de 500 000 soldats français qui quittent le territoire national pour être engagés dans des opérations contre les Turcs aux Dardanelles, puis en octobre 1915 contre les Bulgares en Macédoine. Il faut imaginer Lucien GUIBERT transporté dans un de ces énormes navires en destination de la Macédoine. Il aperçoit la Corse, il passe devant la Tunisie, longe les côtes d'Afrique et approche des côtes de la Grèce.  Il est intégré dans 7ème régiment de la Division d'Orient.


Le débarquement des troupes dans les Balkans 


Belgrade en Serbie

Lucien GUIBERT envoie une carte de la capitale de la Serbie, Belgrade, bombardée en juillet 1914 . Il sent le dépaysement après ces longs jours de voyage et  dit à Thérèse qu'il se trouve bien loin,  à 2220 kilomètres de Paris, par le chemin de fer.

Belgrade bombardée

Dans une de ses cartes du camp franco-serbe de Banitsa, situé près de Belgrade, il  évoque "la retraite de Serbie". En effet, l'entrée en guerre des Bulgares, en septembre 1915, provoque l'effondrement de l'armée serbe qui doit se replier à Corfou. C'est à ce moment que la France décide d'organiser une armée nouvelle confiée au Général Sarrail. Les troupes françaises se replient en Macédoine. Un autre front s'ouvre alors, celui de Salonique, où se retrouvent les troupes retirées des Dardanelles. Lucien GUIBERT fait partie de ces troupes.

Expédition de Salonique

En octobre 1915, à Salonique ont été débarquées les deux premières divisions françaises et une division sous le commandement français du Général Sarrail pour porter secours à l'armée Serbe. Au total ce sont 400 000 soldats qui sont engagés dans ce théatre d'opération. Les cartes postales que Lucien adresse à son épouse témoignent qu'il était bien sous le commandement du Général Sarrail, dans la  Division d'Orient.


Régiment d'infanterie dans les Balkans 1915

Lucien au camp de Zeitinlick 


Le Camp de Zeitinlic près de Salonique Guerre 14-15
Plusieurs cartes postales proviennent du camp de Zeitinlick. Elles laissent supposer que Lucien GUIBERT y séjournait. Ce camp est situé à deux heures de Salonique. C'est essentiellement un camp de tentes. On constate bien sur la carte ci-dessus, les conditions de vie précaires des soldats. Des témoignages de poilus indiquent que l'eau est rare et souvent polluée. Des puits sont creusés et des citernes installées. En journée, les soldats creusent des tranchées autour de Salonique. Une carte postale   représente les soldats dans une tranchée. Ils posent face à l'appareil photo. Je pense que les conditions de vie dans les tranchées étaient bien plus terribles que la photo le laisse supposer.


Les tranchées dans les Balkans 


Le soir, ils retrouvent leur campement insalubre. Des hôpitaux de campagne sont improvisés sous des tentes. Lucien évoque dans une carte sa solde bien maigre. Elle est de 5 francs et le ravitaillement arrive difficilement. Il raconte manger de la soupe et du riz ou des haricots rouges. Il aime les  haricots rouges mais ils provoquent des coliques, dit-il. Malgré ces conditions de vie difficiles, Lucien poursuit son dialogue écrit avec sa chérie et lui envoie cette jolie carte des costumes de Salonique sur laquelle apparait son écriture en crayon à papier.

 Lucien GUIBERT écrit à son épouse


Général Sarrail


Plusieurs cartes postales de Lucien mettent en scène le Général Sarrail au camp de Zeitinlic. Le 11 août 1916 ,  ce dernier prend le commandement en chef des armées alliées d'Orient . Il sera rappelé à Paris en décembre 1917.

le Général Sarrail à Zeitinlic

A la fin août 1916, l'armée française dispose à Salonique de 50 000 combattants dont 30 000 fantassins. Il faut y ajouter 42 000 Anglais, 51 000 Serbes et 10 000 Italiens.


Transfert de Lucien à l'Hôpital de Marine Saint-Mandrier à Toulon

Le bilan humain de l'armée d'Orient est catastrophique. On compte 70 000 tués, disparus ou décédés de maladie. il y aura 44 500 blessés, 283 000 malades. Le typhus, la dysenterie, le paludisme font des ravages sur le front. Le périple d'évacuation des blessés est difficile. Les plus graves sont évacués par des vaisseaux de guerre jusqu'au navire hôpital mouillé au Cap Hellés.  Cinq navires (Asie, Bretagne, Flandres, Charles Roux, La Navarre, Sphinx) assurent des rotations jusqu'aux hôpitaux de Toulon et de Marseille, ramenant à chaque fois 500 blessés ou malades.

Le 23 novembre 1916, une carte postale de M. Blanchon est adressé à Lucien GUIBERT à l'Hôpital de Toulon.

Courrier à l'Hôpital de Toulon 1916

J'apprends donc que Lucien a été blessé sur le terrain et qu'il a été soigné à Toulon. Il écrit à Thérèse qu'il a était installé dans un lit près des grandes fenêtres. envoie plusieurs cartes du navire hôpital France IV où il a du être transféré avant son départ pour Toulon.  Dans une carte du 11 février 1916, de Nîmes,  il précise avoir l'épaule et le bras engourdis mais beaucoup moins que pour la typhoïde. Je dispose d'une indication sur sa santé et sur la maladie infectieuse qu'il aurait contracté près de Salonique.

Navire Hôpital


Lucien sur le front de l'ouest en France en 1917

Après ses soins qui semblent avoir duré plusieurs semaines, il n'est pas renvoyé en Orient. Il est intégré dans le front de l'ouest.  Les cartes postales reprennent en 1917, en provenance du Doubs, du Nord, du Pas de Calais, de Franche Comté. Il est toujours mobilisé au sein du 7ème régiment de la Division d'Orient  jusqu'en 1918.

En février 1917, il est basé à la caserne de Hazebrouck, dans le Nord. Cette ville est bombardée par les Allemands la même année. En équipe, il se déplace jusqu'à Béthune pour installer des poteaux des postes et télécommunications le long des lignes de chemins de fer. Lors des interventions, ils sont cantonnés dans des familles.

En novembre 1917, il est dans le Doubs, à la frontière franco suisse. Il souffre du froid et de la neige et réclame un envoi de paires de chaussettes. Bien qu'il se plaigne de la censure qui l'empêche de recevoir certaines lettres de Thérèse, il demande dans un de ses écrits à son épouse de lui envoyer 20 francs pour améliorer son quotidien. Ses conditions de vie doivent être tout de même moins difficiles qu'en Orient. Mais la famille est loin et le retour pas encore annoncé. Les canons continent à tonner.

L'armistice du 11 novembre 1918

Dans une carte d'octobre 1918, en provenance de Vesoul, il évoque la fin de la guerre. La signature de l'armistice permet à Lucien de revenir enfin à Auxerre et de retrouver ses deux mignons, comme il dit, Germaine âgée de 4 ans et Robert âgé de 3 ans.

Silence et cartes postales

Jamais je n'ai entendu une seule information ou anecdote sur sa vie de poilu. Silence complet. Les cartes postales transmises à travers 4 générations m'ont permis d'évoquer cette période partagée par tant de ses compatriotes. Je découvre seulement maintenant le parcours de cet homme et de ses camarades. Le centenaire de la grande guerre est l'occasion idéale pour évoquer cette mémoire.


Lucien et moi

Mon arrière Grand-père Lucien, que j'ai un peu connu, était un bel homme distingué, gentil et discret. Il a vécu la fin de sa vie, dans une pièce aménagée à l'intérieur de la maison de sa fille Germaine dans la commune de Chailley. Une relation particulière me relie à Lucien. Il est décédé à Chailley (Yonne) , sur le banc placé devant la maison. Il regardait ses arrières petits enfants jouer. Il est mort dans la joie au milieu des enfants. C'est nous qui avons averti ma grand-mère, sa fille, parce qu'il ne bougeait plus sur ce banc. Une inquiétude nous a saisi, sans comprendre. Ce sera ma première rencontre avec la mort. Un souvenir gravé à tout jamais dans ma mémoire.


Lucien Guibert et son arrière petite fille en 1956





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